Deux jours au festival Arte Flamenco de Mont-de-Marsan

lundi 8 juillet 2019 par Nicolas Villodre

XXXIe festival Arte Flamenco de Mont-de-Marsan - du 2 au 6 juillet 2019.

Photo : Nicolas Villodre

Nous avons eu le plaisir d’être convié à la 31e édition du festival montois Arte Flamenco, créé par Antonia Emmanuelli et le département des Landes - un peu dans l’esprit, sur le mode sinon le modèle de celui que Marciac consacre au jazz depuis une quarantaine d’années. Quand y’en a plus, y’en a encore, c’est du moins l’impression qu’on a devant l’arrivée régulière de nouveaux artistes de haut vol, prenant le relais de figures confirmées. Certaines danseuses, en particulier, deviennent chorégraphes à part entière ou ambitionnent d’être reconnues comme telles. Des chanteurs, qui se bornaient humblement à accompagner des figures de Terpsichore, jouent les Caruso, prennent l’alternative, si l’on peut encore employer cette expression sans risquer l’ire de Némésis ou les représailles des fondamentalistes vegans.

Photo : Nicolas Villodre

Mont-de-Marsan a étrenné un nouveau "petit théâtre", qui n’est ni de Renoir ni de Bouvard ; ni de boulevard en général, ni de boulevard du crime en particulier, ni d’ombres ni de marionnettes : une estrade mobile, comme celle des professionnels de la profession – de la commedia dell’arte, vieille comme le monde. Cette scène a pour nom "Trimotor" (ou triporteur) et a été mise au point cette année par la maison "Casa La Teatro" représentée par le plasticien Fernando Rodalva, qui s’est inspirée du motocarro de Piaggio. Sur ce plateau s’est produite gracieusement, dans tous les sens du terme, la bailaora Lucía Álvarez "la Piñona", au style intense et pur, accompagnée par le guitariste Eugenio Iglesias, le percussionniste Pedro Navarro et le chanteur Jonatan Reyes.

Qui peut le moins peut-il le plus ? C’est la question que nous nous posions en assistant aux spectacles des danseuses patentées ou adoubées, ayant eu accès à l’immense plateau du Café Cantante, Mercedes Ruiz et María Moreno. Comme danseuses de corps de ballet ou même comme solistes, il n’y a rien à dire, rien à redire. Toutes deux ont fait leurs preuves, la première en travaillant pour le compte de nombre de chorégraphes du niveau d’Antonio El Pipa, la seconde, ayant eu la chance d’être repérée par Sabine Rabassa, directrice artistique du festival landais, dans une pièce d’Eva Yerbabuena. Être choréauteur(e) n’est pas donné à tout le monde ; être innovateur, encore moins.

Photo : Susana Girón

L’événement est venu d’un cantaor dont votre site préféré avait suivi la route depuis une dizaine d’années au moins, José Valencia. Sur des textes de Rafael Fernández Suárez "El Nene", l’interprète de chant "profond" a enchaîné sans discontinuer les palos qu’il maîtrise à la perfection – fandango, jabera, rondeña, taranta, malagueña, soleá, tiento, bulería. Le titre de son récital, "Con jerarquía", suppose un respect total des pères qui l’ont jusqu’ici drivé et le désir de se mesurer, voire de dépasser ses pairs – le dernier en date étant peut-être Miguel Poveda auquel il emprunte quelques signes, dans son nouveau look plus affûté, son allure générale, sa vêture, sa coiffure. Soutenu par son fidèle tocaor Juan Requena, José Valencia, dont l’intensité et l’ampleur allaient crescendo, a touché tous les couche-tard de la cité qui lui ont fait un triomphe et n’ont eu de cesse de le rappeler, épuisé. Il a été le clou du programme et nous pouvons l’attester.

Nicolas Villodre





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