vendredi 21 janvier 2022 par Claude Worms
René Robert nous a quitté. Nous avons perdu un grand artiste et un ami. Rendons lui hommage comme il l’aurait aimé, en admirant les photographies qu’il nous a léguées. Une histoire frémissante, sensible, amoureuse du flamenco dont il était tant épris et qui lui doit tant. A Sabine.
Donner à voir est mon travail de photographe et faire des images n’est pas seulement, pour moi, une recherche esthétique, mais surtout un moyen de faire connaître et peut-être comprendre, en partie, un être humain à un moment décisif.
Les artistes flamencos me fascinent parce qu’ils vivent "flamencos" dans la vie et sur scène avec une intensité, une vérité, une rage étonnantes. Je pense que le succès actuel et universel de leur art tient à ce qu’ils expriment l’ensemble des réactions humaines face au destin : acceptation douloureuse ou joyeuse, autodestruction, violence ou sérénité. En effet, on ne chante pas flamenco distraitement en exhibant son nombril : on crie sa joie ou ses peines.
Le public est emporté, séduit, voire effrayé par cette quasi indécence, cette vitalité et, parfois, cet état de grâce du chant, de la guitare ou de la danse. La musique et les rythmes complexes emmènent le spectateur dans un monde particulier, mi-oriental, où les forces de vie s’exaspèrent.
Il m’est apparu alors que seul le noir et blanc avec ses contrastes pouvait rendre ce climat et que les effets photographiques devaient s’effacer devant l’intensité de ces instants magiques. J’ai tenté de les fixer avec affection et sincérité, mais aussi avec l’humilité de celui qui montre le chant et la guitare avec des images muettes, la danse avec des mouvements figés.
Art vivant s’il en est, le flamenco supporte mal d’être mis en boîte. De transmission orale jusqu’à récemment, il faisait dire aux gitans : "Ce qui est écrit est mort...". Il évolue naturellement à chaque génération, puisant sa force dans ses racines andalouses, gitanes, profondes, et sa grandeur ne doit rien à des ajouts de modes éphémères.
Je rends donc hommage à ces artistes, qui sont adulés ou brocardés, quelquefois, hélas, encore méprisés.
Moi, j’aime les flamencos...
René Robert
A lire :
René Robert : Flamencos. La rage et la grâce. Paris, Syros Alternatives, 1993 — Préface de José Blas Vega ; texte de Anne-Marie Virelizier.
Corinne Savy : René Robert, le charme discret d’un portraitiste.
Nîmes, 2013
Nîmes, projection sur la Maison Carrée
Nîmes, 2014
Nîmes, projection sur la Maison Carrée
Nîmes, 2015
Nîmes, exposition au Carré d’Art, 2015
Nîmes, 2016
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