Ce mardi 15 janvier, le théâtre de l’Agora d’Evry en Essonne, accueillait trois artistes de talent , le danseur sévillan, Israel Galván, formé à son art par ses parents, Eugenia de Los Reyes et José Galván, et le grand Mario Maya dont il intégra la troupe en 1994, le chanteur Fernando Terremoto, fils de l’inoubliable Terremoto de Jerez, et Alfredo Lagos, également de Jerez de la Frontera, guitariste, accompagnateur favori de José Mercé, Duquende, Arcángel et Estrella Morente.
La soirée débuta par une création sur une pièce d’Albéniz, et dès le départ , Israel Galván a figé son public dans une attente et une attention intense.Ce danseur est "singulier", dans le sens fort du terme, il danse seul, et tout en décalage. Plus que des chorégraphies, ses interventions semblent être des "vignettes" écrites par une main talentueuse : le geste est esquissé, volontairement en ébauche, "inachevé",laissant au spectateur le soin de réinventer par l’oeil, la fin de sa trajectoire. Beaucoup de postures sont amenées au point de rupture de l’équilibre, et ces attitudes majoritairement de profil, semblent évoquer l’art des anciens égyptiens. Tout est lié, le zapateado est exécuté dans le mouvement, rappelant le jeu en arpège ou (et)
en trémolo du guitariste. Le "toque",le chant et la danse s’apprécient séparément ("singulièrement") ils semblent avoir leur vie propre, et pourtant, tout paraît lié. Cela est sans doute dû à la présence permanente des trois artistes sur scène, une présence "active". Personne ne se met "en attente", même le danseur lorsqu’il se met dans l’ombre, assis ou debout, pour laisser la place à la guitare ou(et)au chant, fait partie de la pièce jouée.
Le respect du répertoire flamenco nous paraît évident, même si la danse, parfois en décalage humoristique d’Israel Galván semble se moquer des chorégraphies "traditionnelles"( le danseur esquisse le geste de la danseuse terminant sa danse ou jouant avec sa jupe à volants). Les artistes ont interprété , pour la plus grande joie des "aficionados", cantes de Trilla, Soleares( Soleá,Soleá por Bulería) Taranto de Manuel Torres( "¿dónde andará mi muchacho ?) revisité par Terremoto et Malagueñas del Mellizo(superbement interprétées par le chanteur)
Les Fandangos sont traités en face à face par le chanteur et le danseur et on apprécie le retour de la guitare d’Alfredo Lagos dont le jeu coulé et fluide sur
les Fandangos de Huelva, ne renie pas les apports d’autres musiques.
Israel Galván "se coule" dans la musique,certains de ses gestes évoquent ceux du torero, et lorsqu’il s’immobilise, il le fait à la manière d’un musicien:son immobilité"active" est l’équivalent du silence en musique, elle sert à souligner, à mettre en valeur ce qui n’est pas exprimé.
Terremoto a interprété en duo avec le guitariste, des Tonás et des Siguiriyas excellentes,et Israel Galván a repris la main par des Tangos, toujours en décalage, courts, humoristiques ; l’artiste ne cherche pas la beauté du geste, il va au plus économe, au plus signifiant.
Le spectacle s’est terminé sur des Alegrías subtiles et drôles, dansées de façon fragmentée par Israel Galván et des Bulerías éxécutées "a capella" par le chanteur et épaulées par le danseur.
Félicitons le théâtre de l’Agora d’Evry pour la qualité de sa programmation. Il a permis à un grand public de scolaires (la majorité de la salle) non initié à cet art de faire montre d’attention et de concentration. Leur adhésion fut totale.
Bravo !
Maguy Naïmi
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