Chinín de Triana : "Cante Jondo" / Carlos Ramos : "El Arte Flamenco"

vendredi 29 mai 2020 par Claude Worms

Chinín de Triana : "Cante Jondo" - LP Folkways FW 8723, 1963.

Carlos Ramos : "El Arte Flamenco (Andalucian Suite)" - LP Spanish Music Center SMC 1004, 1959.

La discographie flamenca états-unienne des années 1950 - 1970, bien que très inégale, est riche en (re)découvertes d’artistes méconnus, parce qu’ils ont mené tout ou partie de leur carrière outre-Atlantique et qu’ils se sont essentiellement produit au sein de troupes de danse et dans des restaurants-tablaos de la côte est (Ney York surtout), de Californie et de Floride. La même remarque pourrait s’appliquer à nombre de leurs collègues devenus "parisiens", tels Perico Sevilla ou Canalejas de Jerez, qui firent de longues années les riches heures du Catalan.

C’est la cas de Chinín de Triana, qui, comme son nom de scène ne l’indique pas, est né à Santo Domingo de la Calzada (d’ascendance andalouse tout de même), bourgade de la Rioja Alta plus connue des pèlerins en route vers Saint-Jacques de Compostelle que des aficionados. Nous n’avons trouvé que très peu d’informations sur ce cantaor, dont "Cante jondo" est à notre connaissance le seul disque sous son nom. Après s’être produit quelques années dans les bars de... Logroño, il est remarqué lors d’un concours de cante à Madrid par José Greco, qui l’engage pour une tournée aux Etats-Unis. Comme Pedro Jiménez "el Pili", Domingo Alvarado ou Manolo Leiva, il est par contre souvent associé à des enregistrements de danseuses et danseurs, dont le public des USA était particulièrement friand - notamment avec Luisa Triana et Mario Escudero ("Temas de España" - LP Montilla FM 82, 1956) et Anita Ramos et le guitariste Miguel García ("Ole ! Flamenco" - LP Counterpoint CPT 1504, 1957).

Le programme du disque, très ambitieux, révèle un cantaor certes un peu limité vocalement (pour la longueur de souffle notamment), mais attachant et d’une grande probité. Malgré quelques approximations stylistiques, la variété et la longueur de certaines séries, notamment les livianas et serranas et les siguiriyas (cf. ci-dessous, programme du disque), témoignent du projet d’offrir à l’auditeur un aperçu de la richesse du répertoire traditionnel. De même, la construction des peteneras est intéressante : le diptyque rituel - petenera corta / petenera de Pastora Pavón "Niña de los Peines" - est encadré par une sorte d’exorde original en introduction et une évocation accelerando des anciennes peteneras de baile façon El Mochuelo en conclusion.

L’engagement de Chinín de Triana nous vaut quelques moments d’une grande intensité (les fandangos, entre autres), malgré un accompagnement peu motivant et parfois approximatif - il est vrai que la prise de son caverneuse de la guitare n’aide guère Emilio Bonet.

Claude Worms

Programme du disque - Chinín de Triana (chant) / Emilio Bonet (guitare)

Malagueñas
Taranto et taranta
Peteneras
Tientos
Livianas et serranas
Siguiriyas
Soleares
Fandangos
Debla et toná
Granaína

Malagueñas (El Mellizo et Juan Breva) / Taranto et taranta (El Pajarito ; Manuel Escacena / Manuel Vallejo) / Peteneras / Tientos / Livianas et serranas / Siguiriyas (Paco La Luz ; Diego "el Marrurro" ; Manuel Torres ; Silverio Franconetti ; Manuel Molina) / Soleares (El Mellizo ; Joaquín "el de la Paula") Fandangos / Debla et toná / Granaína

Nous avons déjà croisé le chemin de Carlos Ramos à propos du disque "Danzas y canciones de Andalucía", pour lequel il secondait Mario Escudero et accompagnait Jacinto Almadén. Nous avons retrouvé une interview du guitariste qui nous permet de mieux connaître sa carrière, du moins jusqu’à la date de sa publication par la revue "Jaleo", organe de la "Flamenco Association" de San Diego (Californie) en février 1982 (Volume V, n° 6). Né à Vélez-Málaga et élevé dans le village de Lagos (Axarquía) où son père était propriétaire d’une ferme et d’un moulin à huile, Carlos Ramos a étudié la guitare en autodidacte, puis a commencé à apprendre le métier dans les années 1940 en accompagnant à l’occasion José Cepero, Juan Mojama, Pepe "el de la Matrona", Manolo "el Sevillano", Juan Varea, Jacinto Almadén etc. (pas moins...). Mais ses premières réelles opportunités professionnelles lui sont offertes en 1948-1949 par des engagements dans les troupes de Manolo "el Malagueño" et surtout de Pepe Marchena, dans laquelle il seconde un Ramón Montoya vieillissant pour accompagner la danseuse Carmen Sevilla.

Après une première tournée au Brésil en 1951 avec la compagnie de Josefina María, il traverse une nouvelle fois l’Atlantique avec le ballet d’Hurtado de Córdoba : tournée en Amérique latine et final à New-York, où il s’installe jusqu’en 1964 et se produit au restaurant-tablao "La Zambra", l’un des points de ralliement des flamencos new-yorkais, autant écrire de la "famille Sabicas".
Au cours des années 1950, il continue à jouer pour Hurtado de Córdoba, mais aussi pour José Greco, avant de se produire en Californie (1960), avec le pianiste Virgilio Blanco et le danseur Juan Antonio (un neveu du guitariste Juan García de la Mata), dans un groupe nommé "La Alegría de España", dirigé par la chanteuse María Antonia. En 1962, les récitals qu’il donne trois mois durant au cours l’Exposition Universelle de Seattle le consacrent définitivement en tant que concertiste. Il revient brièvement en Espagne en 1963, pour une série de concerts en soliste, notamment à la peña T1arrega de Barcelone et à la Casa de la Cultura de Málaga. En 1964, la fermeture de la Zambra le décide à s’installer à Washington, où il est engagé au restaurant-tablao "El bodegón". Il y était encore à la date de la publication de l’interview, début 1982, et semblait se consacrer de plus en plus à l’enseignement. Ensuite... ?

"Arte Flamenco. Andalucian Suite", son seul enregistrement sous son nom, révèle un guitariste doté d’une redoutable technique, d’une grande limpidité d’exécution associée à une sonorité incisive très flamenca, jusque dans les trémolos. Si son langage musical est fondé sur le toque de Ramón Montoya (cf. entre autres, la dernière partie en majeur des tientos), il n’en a pas moins assimilé les leçons de Sabicas (les gammes chromatiques en picado, par exemple) et de Mario Escudero (cf. l’harmonisation du zapateado). Pour autant, loin d’être un simple épigone, il a su développer un style personnel mêlant des traits archaïsants à des intuitions franchement modernistes (cf. le passage de la siguiriya à la bulería, très contemporain).

Claude Worms

Malagueña
Zapateado
"Tremoleando"
Siguiriyas et bulerías
Granaína
Soleares
"Fantasia oriental"
Tientos
Taranta
Guajira
Petenera

Programme du disque - Carlos Ramos (composition et guitare)

Malagueña / Zapateado / "Tremoleando" / Siguiriyas y bulerías / Granaína / Soleares / "Fantasia oriental" (zambra) / Tientos / Taranta / Guajira / Petenera

Trois pièces de Carlos Ramos ont fait l’objet de transcriptions pionnières publiées en 1967, qui méritent pour le moins un déchiffrage. Vous y retrouverez quelques falsetas de l’album. Après plus de cinquante ans et en l’absence de rééditions, nous ne pensons léser ni le compositeur, ni le transcripteur (Edward Freeman) ni l’éditeur (Hansen Publications) en les reproduisant ci-contre.

Guajiras

Guajiras / 1
Guajiras / 2
Guajiras / 3
Guajiras / 4
Guajiras / 5

Petenera

Petenera / 1
Petenera / 2
Petenera / 3

Malagueña

Malagueña / 1
Malagueña / 2
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Malagueña / 4

Malagueñas
Taranto et taranta
Peteneras
Tientos
Livianas et serranas
Siguiriyas
Soleares
Fandangos
Debla et toná
Granaína
Malagueña
Zapateado
"Tremoleando"
Siguiriyas et bulerías
Granaína
Soleares
"Fantasia oriental"
Tientos
Taranta
Guajira
Petenera
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Guajiras / 3
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Petenera / 1
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Malagueña / 1
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